En cet hiver 1964, tous les regards – ou presque… – se tournent, du 29 janvier au 9 février, vers la capitale du Tyrol autrichien, où la cérémonie d’ouverture des IXe Jeux Olympiques d’hiver succède, à la Une des médias hexagonaux, à la reconnaissance de la Chine communiste par la France du général De Gaulle deux jours plus tôt. Le pays tente d’oublier la guerre d’Algérie en fêtant le premier anniversaire de sa réconciliation officielle avec l’Allemagne, les bébés de la Libération vont bientôt avoir vingt ans, et les Français ont besoin de rêver un peu…
Par la magie des ondes, ce rêve va en partie venir des skieurs français, qui y décrochent sept médailles – trois d’or et quatre d’argent. Moins que l’Autriche (douze) ou l’Allemagne (neuf) – les deux Allemagne défilent sous le même drapeau… –, mais la France fait (très…) bonne figure grâce à François Bonlieu, qui remporte le slalom géant, et à Léo Lacroix qui talonne l’intouchable Egon Zimmermann en descente. Grâce, surtout, aux sœurs Goitschel, qui signent deux incroyables doublés croisés ; Christine remporte le slalom devant Marielle, et Marielle le géant devant Christine – et l’Américaine Jean Saubert !
Un miracle ? « Ça commence bien avant 1964 ! », s’enthousiasme Gilles Chappaz, journaliste et réalisateur. Et de remettre les choses en perspective : « C’est le résultat d’une politique de détectiondes talents engagée dès le début des années cinquante par la Fédération française de ski. Cela va entraîner un brassage tout à fait bénéfique ! Jusque-là, l’équipe de France, c’était Morzine Megève-Chamonix ; là, elle va s’ouvrir, s’élargir… François Bonlieu décroche l’argent en slalom géant aux championnats du monde en 1954, et Charles Bozon la deuxième place du combiné hommes aux JO de 1956, à Cortina d’Ampezzo. »